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Confidences pour confinement : Gémix

Durant cette période inédite pour les courses françaises, quelques-uns de nos journalistes évoquent les chevaux qui ont marqué leur vie. Stella Bandinu s'est laissée apprivoiser par les courses grâce à un certain Gémix.

par Stella Bandinu le 22 mars 2020



Un monde nouveau à explorer

L’on dit que rien n’est le fruit du hasard dans la vie. Sans doute ce dicton n’a-t-il pas tout faux. J’avais 25 ans quand j’ai croisé mon premier cheval de courses. La faute à mon employeur de l’époque, L’Équipe 21, qui ne faisait pas de différence entre équitation et hippisme. « Un cheval est un cheval », m’a-t-on soufflé. Alors, j’ai écouté. Et appris, beaucoup, pour comprendre la mécanique de ce sport si particulier.

La "shutter", les heats, les canters, j’ai, en 2012 et 2013, saturé mon cerveau de tout ce nouveau vocabulaire propre au trot et au galop de courses, tenté de repérer l’intersection des pistes à Vincennes, aussi. Mais c’est incontestablement la dernière haie d’Auteuil qui m’a fait basculer. Dans cet écrin magnifique comme une parenthèse entre Roland Garros et le XVIe arrondissement de Paris, j’ai découvert ce que le mot « athlète » voulait dire. Des chevaux, tout en muscles, poil ras, oeil vif, et des jockeys, comme invincibles, mes premières foulées sur la Butte Mortemart m’ont séduites. Gémix, lui, m’a conquise.

A Auteuil, la magie naît

Plus petit que les autres chevaux du rond de présentation, le bel alezan détonnait franchement lorsque David Cottin, le plus grand professionnel du vestiaire, grimpait sur son dos. Un couple tellement mal assorti, me suis-je d’abord dit... Jusqu’à les voir voler au-dessus de la première haie. De ces deux opposés naissait une magie incroyable une fois réunis. Une hargne féroce, aussi, que l’on aurait pu retrouver sur un ring. Ces deux-là ont fait naître mes premières émotions hippiques.



Du Prix Hypothèse, collé à la lice, au Grand Prix d’Automne et ses adieux à Auteuil, j’ai tâché de proposer un sujet à chacune de ses courses ! J’ai même repris la direction du local caméra et de son matériel qui me stressait tant ! En un peu plus d’un an et demi, j’ai donc eu la chance d’esquiver quantité de coups de dents et de caresser, furtivement, au moins trois fois sa belle liste en tête tordue. Aujourd’hui, je suis les débuts de ses produits en piste avec toujours la même émotion. Celle que vous procurent les petits outsiders qui gagnent.

Vous ne souvenez plus de lui ? Retrouvez-le en action dans l’une de ses plus belles courses, la Grande Course de Haies 2014.



Je ne connais pas du tout le galop, mais comme il parait que c'est bien je poste cette course !

LE PHÉNOMÈNE OURASI, UNE ÉPOPÉE CONTÉE PAR JOSÉ COVÈS - EPISODE 4 : SON MEILLEUR AMI

PHILIPPE RENOUF, UN LAD À CONTRE COURANT D’OURASI

Lorsqu'Ourasi débarque dans la grande cour carrée du Domaine de Moissy-Cramayel près de Melun, un jeune homme l'attend. Il a vingt-quatre ans. Il s'appelle Philippe Renouf. Il a déjà partagé la vie d'un grand trotteur : Malouin. C'est un garçon doux et patient, tout le contraire d'Ourasi. Le jeune lad va devenir son ami, son souffre-douleur, le meilleur des tranquillisants.

Finalement ce cheval est un faux calme. Il a besoin d'un bon environnement pour s'épanouir. D'un côté, Gougeon son professeur de maintien dans le peloton de tête ; de l'autre, Renouf, sa" nounou ". Philippe veille au grain... de trop car Ourasi ne pense qu'à se goinfrer de paille. Il a tendance à grossir. Renouf, lui, dresse une litière de copeaux de bois. Il veille à son régime.

LES DENTS DE L’AMER
En revanche, son nouveau pensionnaire est un gros fainéant. A l'entrainement, il n'est pas gourmand de la piste. Lorsqu'il faut l'habiller de cuir, pour l'atteler, il gesticule, il montre les dents, l'air menaçant. Un jour, il mord Philippe Renouf. Il en porte toujours les stigmates. C'est pour Ourasi un jeu dont il ne mesure pas la cruauté. Parfois même, le cheval disjoncte. Il a horreur de la promiscuité. Chez lui, à Moissy, il ne supporte pas de sentir un animal dans son dos. Un jour, à la promenade, il est surpris. Il s'arrête pour ruer dans les brancards. L'un de ses sabots frôle la tête de Renouf.

LE COURANT PASSE ENFIN
A Vincennes, il ne veut pas croiser un autre cheval. Avec lui, on est obligé de raser les murs des écuries pour ne pas faire de mauvaises rencontres. C'est aussi ça, Ourasi .

Entre l 'ami Renouf et l 'animal se crée une sorte de champ magnétique. Le courant passe. Ourasi est rassuré. Il est moins sujet au stress. Désormais ce névrotique commence avoir confiance en lui. Un élément capital de sa réussite.

OURASI, « SECRET ET FERMÉ » COMME UN TRÉSOR
" L 'angoisse, pour les chevaux, comme pour les athlètes, leur faire perdre tous leurs moyens", expliquait à l’époque Jean-René Gougeon. Et de poursuivre" Ourasi est le cheval le plus décontracté que j 'aie rencontré. Bellino était calme et froid. Ourasi est plus secret, fermé. On a l 'impression que seule compte la compétition. Et encore sur la piste, c'est lui qui impose son tableau de marche : l 'instant où il décide de prendre son mors pour clouer sur place ses adversaires".

Do Not Disturb ! Avant que "ce Monsieur ne décide d'entrer dans la course. Son driver n 'est plus alors qu'un passager clandestin.

QUAND JEAN-RENÉ GOUGEON FAIT LE STARTER « POUR DE FAUX »
A l 'entrainement, on est obligé pour le tendre de lui adjoindre un cheval au galop. Il arrive même à Jean-René Gougeon d’imiter les commandements du starter pour mettre son cheval sous pression. Bluffant. Sans cela, Ourasi s'en fout. Il est ailleurs.

Face à Jean-René Gougeon, une véritable personnalité. Un caractère bien trempé. Ourasi l’insoumis traite son entraineur d'égal à égal. "J ' ai toujours dit que le cheval n'était pas un animal intelligent. Mais je pense qu'Ourasi est doué d'une certain forme d'intelligence ». Gougeon fait son mea culpa.

1986 : Le cheval reste invaincu cette année-là. Il remporte le Prix d 'Amérique. C'est la vedette, ce n'est pas encore la star. Il est presque invincible. Et Philippe Renouf veille sur son quotidien.

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LE PHÉNOMÈNE OURASI, UNE ÉPOPÉE CONTÉE PAR JOSÉ COVÈS - EPISODE 5 : LE POPULAIRE

LE 2EME SACRE ÉVIDENT D’OURASI

Le Prix d 'Amérique 1987. Ourasi est à la Une. Et l 'on se dit que seul un "extraterrestre" pourrait le battre. Moi le premier. C'est bien connu, il n'y a pas de chevaux imbattables. Pour le mettre KO, il faudrait réunir dans un seul trotteur la vélocité d'un Jamin, l'endurance d'un Bellino II, la maniabilité d'Une de Mai, la sérénité d'Ideal du Gazeau, le petit grain de folie de Fakir du Vivier, la régularité d'une Roquépine, la cinquième vitesse de Tidalium Pelo ! Mais ce trotteur n'existe pas.

Ce prix d 'Amérique 87 est donc couru d'avance. Sans intérêt. Ourasi le domine de la tête et de ses larges épaules. C'est le Grand Blond en avant... toute. Les médias s 'intéressent à lui comme ils s'intéressent à Michel Platini ou Yannick Noah au jour d'une grande finale. Ourasi trotte sur toutes les chaines. Les caméras violent son intimité, elles sont dans son box. La France profonde le découvre Elle est étonnée. Intriguée.

NAISSANCE D’UNE IDOLE

Ce dimanche 25 janvier, tous les regards sont tournés vers Vincennes. Les Français vont découvrir à la télé "Crin blond", le trotteur ailé, la force tranquille. La France est sous le charme. Lorsqu’Ourasi s'échappe à mi-ligne droite, il crève l 'écran. Sa blondeur ressort sur le noir de la cendrée. Ses adversaires sont atomisés. Ils sont frappés de lenteur, et lui trotte sur un cousin d'air. Un grand moment de télévision.

Tout le monde en a le souffle coupé. Le lendemain Ourasi a même droit à une photo dans le journal le Monde, ce qui, à l 'époque, est tout à fait exceptionnel. La veille de ce Prix d'Amérique, André Halphen écrit dans L'Equipe : "Le Super Crack, le voilà. Il s'appelle Ourasi. C'est sans doute le plus grand trotteur de tous les temps". Après sa victoire, Pierre Courtois, toujours dans le même journal confirme ce jugement : "Sa supériorité et l 'efficacité de ses battues étaient telles qu'elles m'ont rappelé la course d'Herb Elliott dans le 1500 mètres des jeux olympiques de Rome.

LES MOTS MANQUENT POUR QUALIFIER OURASI

Daniel Lahalle dans le Matin va plus loin : "A trop vouloir utiliser les superlatifs pour qualifier les vainqueurs des grandes courses, on se trouve démuni lorsque l'événement relève de l 'exceptionnel. Quel adjectif accoler au nom d'Ourasi après que Roquepine eut été qualifiée de merveilleuse, Tidalium Pelo de superbe, Bellino II d'invincible ? Le crack qui a remporté hier le soixante-troisième Prix d 'Amérique ne fait pas oublier ses prédécesseurs, il les fait sans exception, passer au deuxième plan. Seule la mauvaise foi ou un jugement atrophié permettraient de nier que nous soyons en présence du plus grand trotteur de tous les temps".

LE CHEVAL DE LA RUE

Ourasi a créé l'événement. Son nom est descendu dans la rue. Il est le cheval de course dans toute sa splendeur. C'est le champion du consensus. Il est au sommet de sa gloire.

En cette année 87, les victoires succèdent aux victoires ; il en compte vingt et une d'affilée. Un monstre sacré, aussi un sacré monstre. On se l 'arrache. Jean-René Gougeon est son imprésario. Lors de ses déplacements en province, c'est la ruée. Le public veut toucher le champion… au moins des yeux.

LE PHÉNOMÈNE OURASI, UNE ÉPOPÉE CONTÉE PAR JOSÉ COVÈS - EPISODE 6 : UNE MERVEILLE D’ÉQUILIBRE

DU NERF ET UNE BEAUTÉ INTÉRIEURE

Alors, qu'est-ce qui fait gagner Ourasi ? Le docteur Jean-Marie Pitavy, qui a été son vétérinaire traitant, avance deux explications : " Son système nerveux plat et l'extraordinaire harmonie qui existe entre tous ses organes.

Chez le cheval d'exception, c'est le système nerveux qui domine et commande tout le reste. Le dilettantisme d'Ourasi est à la base de sa santé morale. Il prend le temps de vivre. Il ne s'use pas, donc il récupère. Il n'y a aucune anomalie dans son organisme : tout fonctionne à merveille et à plein rendement".

LA MACHINE S’ENRAYE

Le 18 juin 1988 à Vincennes, un petit grain de sable vient enrayer la belle machine à trotter. Ourasi est battu après plus d'un an et demi d'invincibilité. C'est le moral qui a craqué. Une sorte de lassitude. Peut-être. Ou un mal plus pernicieux.

" Il m 'avait prévenu lors de sa victoire dans le Prix des Ducs de Normandie à Caen", expliquera son entraineur." Comme tous les génies, Ourasi a des absences.

Un jour peut-être la mécanique parfaitement huilée va se gripper.

RELANCER LE MOTEUR FACE AU DRAGSTER MACK LOBELL

Et puis, Ourasi n'est pour l 'instant que le Roi de France. L 'Amérique il ne l'a conquise que chez lui, à Vincennes . Et de l 'autre côté de l'Atlantique, il y a... Mack Lobell. Il est le premier trotteur de l'histoire a être passé sous la barre des 1'10 au kilomètre. Le 21 août 1987 à Springfield, "Mighty Mack", c'est son surnom, fait exploser le chrono : 1'09’’7 sur le mile. Incroyable ! Aux Etats-Unis, on a jamais vu un tel dragster sur quatre jambes. Il trotte plus vite que son ombre.

Et cette année-là, Mack Lobell étend sa domination sur le sprint Européen en remportant le prix de l’Elite Internationale à Solvalla en Suéde .

LE PHÉNOMÈNE OURASI, UNE ÉPOPÉE CONTÉE PAR JOSÉ COVÈS - EPISODE 7 : MACK LA MENACE.

MACK LOBELL ET LE « FRENCH POLTRON »

Lou Guida son propriétaire, Chuck Silvester son entraineur et le plus grand driver US John Campbell sont seuls au monde. Ils n'ont peur de personne. Surtout pas de ce Français, ce "tracteur" obligé de trotter sur une grande piste de 2000 mètres pour faire la différence. « Qu'il vienne sur mile nous affronter. Ourasi a peur de mon champion. It's a french poltron", fanfaronne le propriétaire. Le ton monte. Un homme va réussir à organiser ce « Big Match » : le courtier Frédéric Sauque.

LE MARCH OF DIMES EN MONDOVISION

Son projet : un sprint royal avec les meilleurs sur 1609 mètres.

Le March of Dimes se disputera le 17 novembre 1988 à Philadelphie sur l 'hippodrome de Garden Park. La bourse est de 600 000 dollars. Sont présents derrière l'autostart Mack Lobell, Ourasi, Sugarcane Hanover, Napoletano, Callit, Scenic Regal... Un plateau exceptionnel. Que du haut de gamme !

En direct sur Canal+, l 'événement prend une dimension française. Tout Vincennes est devant son poste.

OURASI ET MACK LOBELL, PRIS À LEUR PROPRE JEU

Ourasi est aussi claustrophobe. Le faire monter dans un van n'est pas une sinécure. Toujours est-il que notre cheval a bien voyagé. Ouf !

Sa réputation n 'est pas arrivée jusqu'aux US, le frenchy n'est que le challenger. Et" Big Mack" va le bouffer tout cru.

Jean-René Gougeon sait qu'il devra subir. Avec le 7 derrière la voiture, son Ourasi sera pris de vitesse, alors que John Campbell, sûr de son Mack Lobell, va durcir la course. A Ourasi d'aller cueillir " les morts " dans la dernière ligne droite.

A l 'amorce du dernier virage Mack Lobell a la tête et la corde. Dans le dos de l 'américain, le souffle d'Ourasi. Il a refait son retard. Gougeon passe l'overdrive. Mack Lobell et Ourasi sont au coude-à-coude, Mack la Menace ne peut accélérer, le" french poltron" prend l'avantage, c'est lui le" boss ".

C'est fait. C’est presque fait à dix mètres de la ligne. Deux secondes plus tard, Sugarcane Hanover surgit et gagne. Mais Ourasi deuxième a pris la mesure du trotteur le plus rapide au monde.

AVOIR RAISON : LA RANÇON D’UN QUASI SUCCÈS

Ce tour de force loin du pays va laisser des traces.

Ourasi s'est brûlé les ailes pour mettre K.-O. le bolide yankee. Jusqu' à la douleur. Jean-René Gougeon est las. Il a mal digéré la pression. C'est la première fois.

LE PHÉNOMÈNE OURASI, UNE ÉPOPÉE CONTÉE PAR JOSÉ COVÈS - EPISODE 8 : L'INCROYABLE DÉFAITE

OURASI N’Y ARRIVE PAS

Prix d'Amérique 1989. En ce mois de Janvier, Ourasi a rendez-vous avec l'histoire. Aucun trotteur n'a jamais remporté la plus belle course de trot de la planète quatre fois d'affilée.

Le président Mitterrand est dans les tribunes pour assister à la victoire programmée. La foule aussi. Les médias affluent. Aux écuries, c'est la cohue autour du box, mais la star ne veut voir personne. Elle est agoraphobe. Ourasi est électrique, stressé, tétanisé.

Bloqué.

Philippe Renouf a perdu de son calme. Aucun moment de détente. Impossible de se concentrer. Peu importe. Le public est persuadé que son idole gagnera au gré de son humeur. Mais Ourasi a-t-il encore envie de gagner ?

(NDLR : on apprendra plus tard qu'Ourasi n'a pas pu uriner, un facteur très problématique qui bloque l'action en course)

« C’EST PAS POSSIBLE ! OURASI EST BATTU »

A la télé, Jean-François Pré s'étrangle dans la ligne droite : "Non, c'est pas vrai, c'est pas possible Ourasi est battu" ! Mon confrère n'en croit pas ses yeux et crie son désarroi en direct à la France entière. Queila Gédé, menée par Roger Baudron s'impose avec aisance. "Roger la science" l'a drivée au millimètre. Comme d'habitude. Potin d'Amour, le deuxième tient Ourasi en respect. Le ciel de Vincennes vient de nous tomber sur la tête !

Le crack a craqué.

OURASI PERD JEAN-RENÉ

Ourasi est de plus en plus irascible. Chez Jean-René Gougeon, le coeur n'y est plus. Le"Pape" comme le surnomme ses fidèles, est victime d'une attaque cardiaque. A 61 ans. Il rend les armes. En juin, alors qu'il est drivé par Richard Denéchère, Ourasi se fâche, glisse sur le sol , se fait mal . Il prend quand même le départ pour ne finir que cinquième.
Le champion a le moral dans les sabots.
Il souffre par intermittence de violentes coliques urinaires. Le commencement de la fin ! Qui sait ?

CONFIDENCES POUR CONFINEMENT : TIMOKO, MACHINE À BONHEUR

EN CETTE PÉRIODE SI PARTICULIÈRE LIÉE AU CORONAVIRUS, NOUS AVONS DÉCIDÉ DE VOUS FAIRE PART INDIVIDUELLEMENT DES CHEVAUX QUI NOUS ONT MARQUÉ... CLÉLIA MONCORGÉ A CHOISI TIMOKO.

TIMOKO, UN GRAND PARMI LES GRANDS SOUVENIRS

J'aurais aimé vous citer Blue Dream et son "Président" en 1993, le premier Gr.1 de ma mère avec "p'tites pattes" surnom attribué à Jean-Philippe Mary, son jockey. J'avais dix ans à cette époque, interdiction de bouger du haras, les courses c'était un truc de grands ! J'aurais pu vous décrire le Prix de Paris de Bird Parker, le dernier Gr.1 (pour le moment) de ma mère mais j'aurais sans doute manqué d'objectivité... pas sûre non plus d'en avoir si je vous raconte le deuxième Elitloppet de Timoko mais j'ai choisi celui-ci.

Si tu aimes profondément les courses parce que le cheval est le plus bel athlète du monde, si tu aimes le trot, parce que c'est finalement ta vie, alors tu te dois d'aller à l'Elitloppet au moins une fois dans ton existence !

Mon premier fut en 2016 (oui, il n'est jamais trop tard). La veille se dispute le Harper Hanover, Bird Parker est favori avec le diable Belge, Jos Verbeeck. Il avait fait un temps de chien toute la semaine et au moment du départ, rayon de soleil. Il s'élance sur la mauvaise jambe. Super feeling ! Et si, il le fait pourtant et bat un record du monde. Inutile de vous dire que la victoire de Nuncio dans l'Elitloppet le lendemain est pour moi anecdotique.

2017, LA SUÈDE SE CHERCHE UN ROI ÉTRANGER

Alors que l'année d'avant, il avait fait un froid de gueux, il faut sortir les crèmes solaires en 2017. Stockholm n'avait pas connu ce genre de températures en mai depuis un bail ! Pour la première fois cette année, je travaille pour Equidia comme cadreuse lors d'un grand week-end de courses. C'est la guerre aux écuries pour voir débarquer Bold Eagle. Impossible de louper le barn des français, il y a entre vingt et trente personnes devant l'entrée. Timoko est habitué des lieux, il vient pour la 6e fois à Solvalla et s'apprête à disputer sa 5e batterie qualificative. Pourtant, il est au calme avec les chevaux de Björn Goop. À l'heure qu'il est, Bold Eagle a Solvalla à ses pieds, il vient de se qualifier dans un chrono monstrueux. Pierre Pilarski et Thomas Bernereau ont du mal à se frayer un chemin pour aller jusqu'au podium. Je m'agrippe à eux pour être sûre de passer, je vous rappelle que j'ai la caméra, le boitier transmetteur sur mon dos et que l'on doit faire du direct avec Kristin Odegard. C'était le premier à passer. Après, j'avoue que le pour reste c'est un peu black out. La batterie de Timoko arrive tout de suite derrière. Il est 3e de Nuncio, je me souviens même que Propulsion était alors drivé par Johan Untersteiner.

ET CE FUT L'ANNÉE DES DÉPARTS CATASTROPHES

Avant les batteries, les sourires sont encore présents sur les visages, on déconne encore un peu. Les professionnels se réunissent sur la terrasse pour effectuer le tirage au sort. On échange tactique mais lorsqu'on vient scratcher l'étiquette avec le nom de son cheval face au numéro derrière la voiture, ça blague beaucoup moins.
Richard Westerink fait son petit truc dans son coin, sauf que n'oubliez pas : d'une, il a Björn Goop avec lui, et de deux, il est sur le point de disputer son 5e Elitloppet consécutif, avec le même cheval, c'est rodé tout ça, les choses se font machinalement. Pour nous journalistes, trop compliqué de suivre la Team Bold Eagle côté foule. On choisit de vivre la finale à l'intérieur de la piste. Sébastien Guarato est présent d'un côté, de l'autre côté se tient Richard Westerink.

Tout le monde a vu les images à la télé, Bold Eagle monte en pression, en revanche plus discrètement, Björn Goop met sous pression Timoko. Il est obligé, il a opté pour le numéro 5, un choix par défaut puisqu'il n'avait pas la priorité au tirage au sort ! Dans la tête du driver suédois, il est clair que le plus dur est de prendre la tête avec un tel numéro mais une fois fait, la cause est "presque" entendue. Je filme la course, les chevaux passent pour la première fois devant les tribunes. La clameur te donne le palpitant mais il ne faut pas trembler, je filme ! Je "shoote" Timoko et je laisse glisser sur Bold Eagle. je vois les rênes de Franck Nivard qui flottent, je me dis que c'est plié et je dis à Kristin "C'est mort, Bold n'a pas de gaz". Aucune émotion sur le visage de Sébastien Guarato, je me dis encore "Il sait" et il faut que je passe à autre chose.

VIVRE LA COURSE DANS L'OEIL DE CELUI QUI REGARDE

Dans mon dos, Richard Westerink commence à soutenir son cheval. Céline et Jean-Yves Lhérété, ceux qui s'occupent de Timoko au haras, font des pas de côté en hurlant. Profiter du spectacle mais le faire vivre à travers ma caméra, quand tu es amoureuse de ce sport, c'est chaud ! Un instant je perds Richard Westerink et je le retrouve en train de se rouler dans l'herbe avec Jean-Yves Lhérété. À 10 ans et malgré tous ses combats, Timoko s'adjuge un 2e Elitloppet. En gagner deux, c'est possible : Varenne, Mack Lobell, Ideal du Gazeau, Roquépine, Gélinotte et d'autres l'ont réalisé, mais en pleine force de l'âge. À 10 ans, c'est monstrueux !

Il est difficile de gagner un Elitloppet, encore plus pour un Français parce que c'est sur le mile, parce que c'est une petite piste, parce qu'il y a le voyage en avion, parce que le sol est différent. Pour s'en rendre compte, il suffit de reprendre quelques gagnants : Dijon l'an passé y a laissé quelques plumes. Ringostarr Treb n'a regagné qu'une grande course un an après. Magic Tonight fut une énorme suprise. C'est dur, mais qui se souvient de Nahar, gagnant d'Elitloppet ? Bold Eagle a changé depuis ce voyage. À trois ans d'intervalle "Le Phoenix" Timoko, bien que touché par la maladie Lyme, est ce 27 mai 2017 un bulldozer. À 18h à Solvalla, ce jour-là, il règne une euphorie apaisante, un tourbillon de bonheur. Face à ma caméra, Kristin rend l'antenne au bord des larmes.

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LE PHÉNOMÈNE OURASI, UNE ÉPOPÉE CONTÉE PAR JOSÉ COVÈS - EPISODE 9 : LA QUATRIÈME DIMENSION

L’ENTERREMENT EST DÉJÀ ORGANISÉ

Lorsqu'il peut vider sa vessie avant l 'effort, Ourasi redresse l 'encolure pour faire la course en tête. Il épingle cette année-là sur son fabuleux palmarès le prix de Paris à Vincennes, de l'Atlantique à Enghien, le Critérium de vitesse à Cagnes sur mer et le Grand Prix d'Oslo. Mais la donne a changé.

Malade, Jean René Gougeon, le patron est diminué. Minou son frère cadet a pris le relais. Auprès "du grand blond", toujours son fidèle Philippe Renouf. Sa présence rassure. Il veille. Le supporte. Il n'a aucun doute sur la capacité de son champion à relever le dernier défi : remporter à 10 ans un quatrième Prix d'Amérique. Exploit unique. L 'extraterrestre dans la quatrième dimension. Déjà, certains qui l'adulaient hier n'ont aucun scrupule pour l'enterrer. S’ils savaient !

OURASI VA-T-IL PISSER ?

28 Janvier 1990. Atmosphère : elle est pesante. Ourasi reste sur trois défaites. Il ne nous a pas habitué à n’être qu’un simple figurant. C'est en fait une préparation intelligente. Une manière douce pour tout donner en une seule fois. La dernière. Oui mais… Ourasi va-t-il pisser ? Ne va-t-il pas se bloquer les reins au moment du départ ? Pour le savoir, Canal+ a mis une petite caméra dans son box. Le public s'interroge. Il doute. Renouf surveille le moindre mouvement de son animal favori. Minou le driver, pour une fois, a la tête des mauvais jours. Jean-René Gougeon, malade, est impuissant. Raoul s'enferme un peu plus si c’est possible dans son silence.

" Ourasi a fait pipi en direct sur Canal ". L 'info traverse l'hippodrome à la vitesse de l'éclair. Le cheval s'est soulagé. Et avec lui, nous aussi. Ouf ! Plus léger, plus souple, Ourasi fait tomber le record de l 'épreuve. Il trotte dans les étoiles. C'est fait et bien fait pour tous ceux qui l'aiment. Jean-René est en pleurs, Philippe est dans un état second, Raoul ne peut que sourire. Minou a la bouche sèche... La France est heureuse. Nous aussi.

UN HÉROS DE ROMAN

Le 25 janvier 2004, Ourasi quitte un instant la couverture du "Roi Fainéant" le livre d'Homéric. Ce dimanche, Vincennes lui déroule le tapis rouge. Le héros de roman ouvre le défilé du Prix d'Amérique. Il a 24 ans. Le grand blond n'a rien perdu de sa superbe. Et il le sait, il salue son public. Tel un paon faisant la roue. Il se la pète !

Dans les tribunes tout le monde se lève pour Ourasi, le Roi aux 58 victoires et aux quatre Prix d'Amérique.

UN PÂLE HÉRITAGE HORMIS SON PROPRE DESTIN

Les clameurs se sont tues. Ourasi est retourné au Haras de Gruchy près de Bayeux . C'est plus un havre de paix, qu'un hôtel pour un étalon. Le cheval n'a pas la fibre paternelle. Il est pratiquement stérile. Un Roi sans descendance. Il n’ a pu ou n'a pas voulu transmettre son fluide. Le fluide de la victoire.

Janvier 2013. Ourasi s'éteint à l'âge de 33 ans. Sa dame de compagnie Anne Jumel, Gérard Fortier, son plus grand fan, et Pierre Lamy le directeur du haras sont auprès de lui. Personne ne l'a oublié .

Le trot reconnaissant a décidé de lui élever une statue, comme Gladiateur à Longchamp, Al Capone à Auteuil , Red Rum à Aintree... tous chevaux de légende !

A Vincennes Ourasi, l'Immortel est au paradis !

Si vous pensez qu’on en a fini avec Ourasi, c’est faux, retrouvez nos bonus vidéo demain dans un dernier épisode en forme d’épilogue de la saga.

LA STATUE D’OURASI À VINCENNES

Si le livre d'Ourasi est signé Homéric, sa statue est de Kasper. Décidément, les artistes au pseudo en un mot adore le roi !

Ourasi dans Paris

L’inauguration de la statue d’Ourasi à Vincennes

LE PHÉNOMÈNE OURASI, UNE ÉPOPÉE - EPILOGUE : L'ÉPILOGUE DE CE CHEVAL DE L'ÉGENDE.

Le haras de Gruchy ouvrait ses portes le 7 juin 2014, à quelques jours de l'inauguration de leur champion Ourasi à Vincennes. C'est là que le champion est mort, cette année, à l'âge de 32 ans.

Il y a 4 mois à peine, le PMU revisitait à sa façon le destin du célèbre Ourasi

L'ÉQUIPE D'OURASI
Merci à l'APRH, Philippe Renouf et Scoopdyga qui est né pratiquement quand Ourasi terminait sa carrière.