Le Trot - L’Amérique dans le viseur : les confidences de Philippe Dauphin
L’éleveur-propriétaire de Billie de Montfort disputera le 28 janvier prochain son premier Grand Prix d’Amérique. Un véritable miracle pour cet hôtelier-restaurateur qui partage son temps entre la Charente-Maritime et la capitale et qui doit sa passion à son père Albert Dauphin, éleveur au Haras de Montfort. Entretien.
Phillipe et Pascal Dauphin avec le trophée du Critérium des Jeunes remporté par leur élève Billie de Montfort à Vincennes Hippodrome de Paris © ScoopDyga
Philippe Dauphin est un propriétaire comblé. Grâce à sa championne Billie de Montfort, dont le compte en banque s’élève à plus de 1,5 millions d’euros, ses couleurs seront représentées dans le prochain championnat du monde des trotteurs. D'humeur joviale, l'homme d’affaires revient sur cette qualification inespérée, son association avec Sébastien Guarato et sa passion pour les courses de trot. En toute simplicité.
Philippe, qu’avez-vous ressenti dimanche dernier en voyant Billie de Montfort terminer deuxième du Grand Prix du Bretagne ?
PD : « Ca a été un grand moment d’émotion. Cela faisait longtemps qu’elle n’avait pas couru sur les 2700 mètres de la grande piste. "Billie" est plus à son avantage sur courtes distance. Le but, c’était de courir sagement à la corde, pour faire uniquement la ligne droite. Son driver, David Thomain, a été parfait. Il lui a donné un parcours en or et lorsqu’elle a vu le jour à mi-ligne droite finale, "Billie" a jailli. Elle finit d’ailleurs très près du lauréat, Valko Jenilat. »
Vous n’envisagiez pas un seul instant monter sur le podium de la première étape du Circuit Trot des EpiqE Series ?
PD : « Vraiment pas (rires). "Billie" n’avait pas couru à Vincennes depuis plus d'un an et elle n’avait pas revu les 2700 mètres de la grande piste depuis un moment (NDLR : le 22 août 2016 dans le Prix Jockey où elle se classait quatrième). L’an passé, nous avions décidé avec Sébastien (Guarato) de faire l’impasse sur le meeting d’hiver pour la préparer en vue des belles courses du Printemps et de l’Eté. Ce Prix de Bretagne, c’était un véritable test pour elle car "Billie" aurait très bien pu nous faire comprendre qu’elle en avait marre…et on ne lui en aurait pas tenu rigueur car cela fait un moment qu’elle est sur le pont ! »
Avec 15 victoires et près de 75% de réussite dans les trois premiers en 60 courses, Billie de Montfort est un véritable métronome.
Quelle victoire vous a le plus marqué ?
PD : « Le Critérium des Jeunes, bien sûr, reste un moment magique. C’était extraordinaire et c’est aussi l’illustration qu’elle court au plus haut niveau depuis son plus jeune âge. Il y a aussi cette victoire à Angoulême, pour ses premiers pas en compétition à deux ans. Comme j’ai un hôtel-restaurant à l’Île-d’Oléron (NDLR : qu’il gère avec son frère Pascal Dauphin), Sébastien m’avait fait plaisir en la faisant débuter à l’hippodrome de la Tourette. C’était vraiment sympa de sa part et j’en garde un merveilleux souvenir, même si j’étais loin de me douter que je touchais le meilleur trotteur de ma vie (rires). »
D’où vous vient cette passion des pour les courses de trot et comment avez-vous fait la rencontre de Sébastien Guarato ?
PD : « Le dénominateur entre ma passion et Sébastien, c’est mon père, Albert Dauphin. Il était éleveur au Haras de Montfort (NDLR : dénommé aujourd’hui Montfort & Préaux, propriété de Sylvain Vidal, éleveur d’Avenir Certain, La Cressonnière et Brametot) entre Orbec et Lisieux dans le Calvados. J’ai drivé en amateur, et même gagné à Vincennes. Avec mon frère, on a toujours fait de l’élevage, mais à notre petit niveau, avec un maximum de trois poulinières, car nous avons notre hôtel-restaurant à gérer. La rencontre avec Sébastien Guarato s’est faite au début des années 2000. Mon père a fait appel à Sébastien pour qu’il devienne son entraîneur particulier. Et comme Sébastien est un « crack », il n’a pas tardé à voler de ses propres ailes, avec la réussite que l’on connait. »
Qu’est-ce que vous appréciez le plus chez Sébastien Guarato ?
PD : « C’est difficile à dire… (Il observe un temps de réflexion). Sébastien est un grand professionnel mais la dimension humaine est importante chez lui. Il sait gérer l’égo de ses propriétaires parce qu’il a son franc-parler et dit les choses telles qu’elles sont. Et puis il y a des évidences qui sautent aux yeux… Avec "Billie", nous avons été fréquemment en concurrence avec Bold Eagle et cela ne nous a pas posé de problème. Bold Eagle étant le crack de l'écurie, nous avons couru régulièrement pour la deuxième place, et cela n’a pas du tout altéré ma relation avec Sébastien et Pierre Pilarski. Je suis très heureux comme ça. »
Que représente pour vous le fait de courir le Grand Prix d’Amérique, la plus belle course au monde ?
PD : « C’est merveilleux ! Rendez-vous compte : avec mon frère, nous n’avons fait que de l’élevage et n’avons jamais acheté de cheval « clé en main ». Alors disputer une course comme celle-ci avec une jument que nous avons fait naître, ça va au-delà de toutes nos espérances. Ces moments-là , on ne veut pas les gâcher… Je vais toucher du bois et espérer qu’il ne lui arrive rien jusqu'au 28 janvier. C’est le summum du summum de courir le Prix d’Amérique. »