JDG
C’est un grand nom des courses qui nous a quittés avec la disparition de Gaëtan Gilles à l’âge de 86 ans.
Avec ses élèves, il aura marqué une époque, aussi bien en plat qu’en obstacle. Évidemment, son nom restera à jamais gravé au côté de celui de son élève Mid Dancer (Midyan), le sauteur le plus riche de l’histoire des courses d’obstacles françaises avec 3.367.930 € de gains. Ce cheval a notamment gagné trois Grands Steeple-Chases de Paris (Gr1), rejoignant les autres record horse de la course, Hyères III et Katko, rien que ça ! Mid Dancer avait aussi enlevé la Grande Course de Haies d’Auteuil (Gr1) et le Prix La Haye Jousselin (Gr1). Gaëtan Gilles l’avait vendu après qu’il avait gagné sous ses couleurs sur les haies de Compiègne, alors entraîné par Marie-Laëtitia Mortier.
Un éleveur classique.
L’éleveur installé au haras du Patis, près de Baugé-en-Anjou, avait aussi atteint les sommets en plat, ayant fait naître le très bon étalon Chichicastenango (Smadoun), lauréat du Juddmonte Grand Prix de Paris (Gr1) 2001, mais aussi le fils de ce dernier, Vision d’État, vainqueur du Prix du Jockey Club (Gr1) 2008. Un Jockey Club dont il avait fini deuxième avec… Chichicastenango ! Vision d’État a évolué à la même époque que Mid Dancer et, outre son Derby français, il avait enlevé trois autres Grs1 : le Prix Ganay, les Prince of Wales’s Stakes et la Hongkong Cup.
À cheval entre plat et obstacle.
Citer tous les bons élèves de Gaëtan Gilles prendrait beaucoup de temps. Mais il ne faudrait pas oublier ses autres bons chevaux voire ses champions comme Rose or No (Rose Laurel), suffisamment bon pour gagner le Prix Edmond Blanc (Gr3) puis la Grande Course de Haies d’Auteuil (Gr1), Green Noon (Green Tune), qui avait offert un premier Groupe à Yann Lerner comme jockey dans le Prix d’Aumale (Gr3), avant de devenir la mère de Green Moon (Montjeu), futur vainqueur de la Melbourne Cup (Gr1), Traffic Fluide (Astarabad), qui avait débuté sous ses couleurs, avant d’être vendu en Angleterre, où il a gagné deux Groupes en steeple et s’est placé de Gr1 ou encore Smala Tica (Loup Solitaire), double gagnante de Listed. Cette dernière lui avait donné Chika Dream (Danehill Dancer), qu’il avait co-élevée avec Coolmore. Sous ses couleurs, cette dernière avait remporté le Prix du Point du Jour (L) à Craon.
Grâce à tous ces chevaux, Gaëtan Gilles avait terminé plusieurs fois dans le top 10 des éleveurs en obstacle et en plat. Il nous avait raconté : « Ce sont deux disciplines différentes mais pour moi cela ne change rien. J’élève pour faire des champions car il faut toujours faire les choses à fond. J’aime sentir les choses et prendre en compte tous les détails. Par exemple, il m’arrive de faire changer les rations et de les adapter en fonction du temps de la journée. Ce n’est pas toujours évident à expliquer… »
Un homme de la terre.
Éric Libaud a entraîné pour Gaëtan Gilles, mais il a aussi sublimé l’un de ses élèves, Vision d’État. Ce vendredi soir, il nous a confié : « Gaëtan Gilles était un grand éleveur au tempérament bien trempé. Il a su fabriquer de bons chevaux. C’était lié à une alchimie entre ses terres et l’alimentation. Je le vois avant tout comme un homme de la terre tout simplement. Il avait un sol qu’il comprenait et qu’il amendait en fonction de ce qu’il fallait. Nous avons collaboré assez longtemps avec un réservoir de bons chevaux comme Smala Tica, la sœur utérine de Chichicastenango. Vision d’État venait bien entendu de chez lui. Je l’avais découvert dans ses prés mais il n’y avait rien d’écrit à l’avance et il faut surtout beaucoup de chance dans ces cas-là. » Donatien Sourdeau de Beauregard a également entraîné pour Gaëtan Gilles. Il a notamment eu La Symphonie (Martaline), troisième du Prix Sytaj (Gr3) sous son entraînement. Il nous a dit : « Monsieur Gilles a eu quelques chevaux chez moi. Il aura marqué l’histoire des courses, ne serait-ce que par les cracks qu’il a élevés comme Mid Dancer. Il a également produit des étalons comme Vision d’État et Chichicastenango. »
Un exemple pour les autres.
Sans avoir une structure immense, Gaëtan Gilles a donc réussi des performances qui font fantasmer tout homme de cheval. L’histoire de Vision d’État est d’ailleurs de celles qui font rêver tous les éleveurs. Après sa victoire dans le Jockey Club, nombre d’entre eux étaient venus le féliciter en lui disant : « C’est formidable, on peut en faire autant. » Au lendemain de la victoire de Vision d’État, il nous avait raconté : « Je n’ai rien pu faire de la journée. J’ai reçu beaucoup de félicitations. J’ai l’impression que les gens sont très heureux que le succès soit 100 % français, avec un éleveur français, des origines françaises. C’est vraiment différent de d’habitude où on ne voit que des grands noms [lointains, ndlr]. Ce succès est vraiment complet et plus fort que celui que j’ai connu avec Chichicastenango [Grand Prix de Paris, ndlr]. Il faut dire que j’étais alors associé sur le cheval. Ce qui me fait plaisir, c’est aussi que le fils a vengé le père. »
L’histoire de Vision d’État est amusante puisque Gaëtan Gilles nous avait dit au sujet de sa mère Uberaba (Garde Royale) : « Je l’avais achetée pour faire une poulinière d’obstacle. » Quatre fois lauréate à Auteuil, elle avait d’ailleurs été croisée à des étalons clairement estampillés obstacle : Cadoudal, Kadalko, Double Bed (au profil plus mixte).
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