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Actualité - 16.08.2020
Alain Beaumont n'est plus
Nous avons appris ce dimanche matin avec tristesse le décès d'Alain Beaumont, éleveur et propriétaire passionné, et à qui on doit Cleangame.
Après un combat de trois ans face à la maladie, Alain Beaumont s'est éteint jeudi à l'âge de 64 ans. La veille, son champion Cleangame lui aura rendu un dernier hommage en remportant avec brio le Prix Jean-Luc Lagardère. Homme passionné de chevaux dans tous leurs états (voir ci-dessous) et de courses, Alain Beaumont aura connu les affres de l'élevage avant de toucher enfin la perle rare avec son Cleangame (Ouragan de Celland), grâce à sa poulinière Red Bell .
Le Manchois fut aussi primordial dans la naissance du Haras de Vire, structure normande bien connue. À sa tête Hugo Disant et Michel Ledunois savent ce qu'ils doivent à Alain Beaumont dans la mise en place de cette structure au moment de la réforme des Haras Nationaux et leur émotion est immense à l'heure des souvenirs.
Province Courses présente ses sincères condoléances aux proches d'Alain Beaumont et nous vous proposons de redécouvrir l'article que nous lui avions consacré dans l'édition hebdomadaire de Province Courses datée du 6 avril 2018.
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ARTICLE DU 6 AVRIL 2018
LE MANCHOIS ALAIN BEAUMONT TOUCHE SON GRAAL
Cleangame ou la récompense d'un véto élevant au feeling
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Mais venons-en au premier des artisans ayant « fabriqué » Cleangame, Alain Beaumont, copropriétaire de la clinique vétérinaire de Gavray, structure regroupant aujourd'hui une douzaine de vétos, dont l'épouse de l'éleveur, avec cinq spécialistes équins. Au début des années 2000, l'homme, appelé au départ à soigner indistinctement bovins et chevaux, compte parmi sa clientèle l'Écurie Gallier. Celle dont défend les intérêts le prochain crack du trotting, Jag de Bellouet.
« Avec Jag de Bellouet, j'ai vraiment vécu une belle aventure et, en plus, à la même période, je m'occupais aussi du talentueux Selle Français Flipper d'Elle, champion d'Europe de CSO, discipline que j'ai d'ailleurs pratiquée pendant une quinzaine d'années. Pour un vétérinaire, c'est le must d'être le garant de la bonne santé de tels chevaux, affirme le praticien. J'ai aussi eu le plaisir, lorsque "Jag" a couru en Suède et en Finlande, de l'accompagner. Mais c'est quelques saisons plus tôt que m'était venue l'envie de trouver une jument à lui marier. Ainsi, fin 2003, j'ai acheté Danaé Grandchamp, la grand-mère de Cleangame, à M. Langelier, habitant La Trinité, petite commune proche de Villedieu. Il voulait arrêter l'élevage mais tenait avant tout à ce que sa poulinière soit bien soignée et bien traitée. Cette bonne compétitrice était alors pleine, mais le produit qui allait naître au printemps ne s'est pas distingué, contrairement à ses aînés, Millenium, gagnant à Vincennes la veille du jour où j'ai acquis sa mère, et la future lauréate semi-classique Nippy Girl ».
Un premier épisode sympathique avec cette souche de trotteurs pour le Manchois qui, en revanche, en a vécu un deuxième rocambolesque... pour ne pas dire plus. « Quand Red Bell, la génitrice de Cleangame, a été en âge de partir au travail, je l'ai confiée à un client dont le fils s'installait comme entraîneur. Je trouvais intéressant d'aider un jeune, déclare-t-il. Mais, sans que j'en ai eu connaissance, la pouliche a été mise à l'entraînement chez Ulf Nordin, et qui plus est en utilisant mon nom. C'est ainsi qu'un jour Mme Nordin, ayant trouvé mes coordonnées via internet, m'a appelé pour m'enjoindre de payer les factures non honorées concernant Red Bell (N.D.L.R. : qualifiée et ayant couru trois fois sans résultat). Vous imaginez quelle fut ma surprise ! Ensuite, ça a été toute une histoire pour la récupérer. Ce que j'ai réussi à faire grâce à l'intervention du fils de l'indélicate personne qui a enfin payé ses dettes. La jument est alors arrivée comme poulinière à la maison, destin que j'avais programmé pour elle dès sa conception ».
Ainsi a commencé la seconde carrière de Red Bell dont le premier produit s'est avéré être un mâle et a été baptisé Cleangame. « Je l'ai présenté, à 18 mois, aux ventes de yearlings de Caen, indique Alain Beaumont. J'avais marié la jument à Ouragan de Celland car il s'agissait d'un trotteur de qualité, mais surtout, nous venions, suite à un appel d'offre, de reprendre le Haras de Vire. "Ouragan" s'y trouvait déjà précédemment pour le compte des Haras Nationaux, puis de France Haras. Lors de la disparition de cette entité éphémère, l'étalon a été racheté par son ancien propriétaire, M. Azria, lequel a décidé de nous le confier une année sur deux, en alternance avec le Haras de la Sauvagère. À compter de la présente saison, le Haras de Vire, qui loue l'emplacement et les locaux qu'il occupe à la ville calvadosienne, est à 80 % la propriété de Michel Ledunois et Hugo Disant, deux anciens de l'administration, très compétents, y compris en matière de préparation de poulains pour les ventes, et avec lesquels nous avons bien fait progresser l'entreprise. »
Tel est Alain Beaumont, un véto élevant et s'investissant plus au feeling qu'en recherchant le seul profit. L'unique autre élément de son actuel petit cheptel reproducteur est d'ailleurs Airémie, « une fille de Quatre Juillet s'étant blessée très jeune et mariée jusqu'ici aux étalons du Haras de Vire ». Comme cela a été majoritairement le cas de Red Bell, dont le yearling nommé Harkonnen, « inscrit, comme promis aux organisateurs, aux futures vacations caennaises », gambade dans les prés gavraysiens en compagnie d'Hélium, à la fois son frère consanguin et son cousin germain puisque fils d'Ouragan de Celland et Airémie. Actuellement, Red Bell est pleine (à terme en juin) d'un produit de Brillantissime, « un étalon dont j'ai vu plusieurs magnifiques poulains chez des clients », conclut le Morbihanais d'origine qui, après son périple d'étudiant dans plusieurs régions, s'était « fixé ici en Normandie, la région du cheval ».